Les progrès fulgurants de la médecine nucléaire

Novartis apprivoise l’énergie nucléaire et la met au service de la lutte contre les cancers avancés.

11 septembre 2020

Par Elizabeth Dougherty

A la fin du 18e siècle, les scientifiques découvraient pour la première fois l’énergie nucléaire à une époque où la population se déplaçait encore en voiture hippomobile et s’éclairait à la bougie. Ils ont mis en évidence d’étranges éléments, tels que l’uranium et le radium, qui émettent un rayonnement invisible auquel ils ont attribué le nom de « radioactivité ». 

Lorsqu’ils ont remarqué que ce rayonnement invisible pouvait entraîner des brûlures de la peau, ils ont décidé de s’en servir pour traiter le cancer. Les bénéfices étaient évidents mais il a encore fallu des décennies pour comprendre comment manipuler en toute sécurité cette énergie libérée par le noyau atomique de ces éléments spéciaux.

Il existe à présent une forme nouvelle de cette médecine nucléaire qui n’a plus rien à voir avec la radiothérapie d’autrefois. La thérapie ciblée par radioligand exploite par exemple l’énergie des atomes radioactifs et la délivre de manière directe et ciblée dans les cellules cancéreuses, peu importe leur localisation dans l’organisme. Novartis investit dans cette forme émergente de médecine nucléaire car elle a le potentiel pour devenir une pierre angulaire de l’oncothérapie.

Aujourd’hui, environ deux tiers de tous les patients cancéreux reçoivent, sous une forme ou sous une autre, des rayons au cours de leur traitement. La plupart des traitements font appel à des faisceaux de rayons ou à des grains radioactifs implantés, ces deux techniques étant des traitements « locaux » typiquement réservés aux cancers encore peu étendus.

La thérapie ciblée par radioligand élargit le champ des possibilités thérapeutiques. Elle est administrée par voie sanguine afin d’atteindre les cellules cancéreuses à n’importe quel endroit du corps et délivre de l’énergie radioactive pour tuer les cellules tumorales.

« C’est génial parce que c’est si simple » déclare Germo Gericke, Responsable de la recherche et du développement de la médecine nucléaire chez Novartis.

Un siècle d’apprentissage

Les scientifiques ont commencé à exploiter les rayons à des fins médicales dans les années 1950, lorsqu’ils ont appris comment focaliser les faisceaux de rayonnement pour traiter des foyers cancéreux. Les thérapies guidées par ordinateur ont amélioré la précision et réduit les lésions sur la peau saine et les tissus avoisinants. 

Mais, selon Germo Gericke « même le plus sophistiqué des rayonnements externes assistés par ordinateur reste un instrument relativement imprécis. Rappelez-vous qu’ici, les cellules sont ciblées par un énorme faisceau »

A contrario, la thérapie ciblée par radioligand délivre un rayonnement ultra précis atteignant avec exactitude les cellules tumorales partout où elles se cachent. Cette médecine non conventionnelle consiste en deux composantes principales, à savoir un atome radioactif et une molécule spécifique de la tumeur.

La molécule spécifique de la tumeur peut être considérée comme une pièce de puzzle correspondant aux pièces complémentaires du puzzle moléculaire à la surface des cellules cancéreuses. Ces molécules superficielles n’attendent pour ainsi dire que de nouvelles arrivantes correspondantes. Les deux pièces s’imbriquent lorsque le médicament est en approche. Et : Les pièces du puzzle chimique ne correspondent pas aux molécules superficielles des cellules saines, ce qui fait que le médicament passe à côté d’elles.

« Nous sommes capables de délivrer un rayonnement sur un tout petit foyer cancéreux à n’importe quel endroit du corps car nous exploitons l’appétence du cancer pour les molécules spécifiques des tumeurs. » déclare Chris Leamon, expert en découverte de médicaments pour la médecine nucléaire chez Novartis. 

Pour l’heure, les chercheurs ne disposent que de quelques pièces du puzzle ne correspondant qu’à quelques formes de cancer, de sorte que l’arsenal des thérapies par radioligand approuvées et expérimentales reste limité. L’équipe de Chris Leamon ainsi que d’autres chercheurs de Novartis travaillent cependant sur d’autres découvertes pour étendre l’utilisation de la thérapie ciblée par radioligand et traiter davantage de types de cancer.

Utilisation de l’énergie nucléaire

L’atome radioactif, qui est au cœur de la thérapie ciblée par radioligand, n’est en réalité qu’un atome dégageant de l’énergie. Les atomes choisis pour être utilisés dans ce médicament disposent de propriétés spécifiques ayant une valeur médicale. 

Ces atomes ont par exemple la capacité de détruire les cellules cancéreuses. L’énergie destructrice émanant des atomes radioactifs est quasi primitive, presque comme si on lançait des pierres sur la machinerie vitale d’une cellule tumorale et qu’on la faisait s’écrouler.

C’est génial parce que c’est si simple.

Germo Gericke

Le rayon d’action de cette énergie destructrice n’excède pas quelques millimètres, de telle sorte que les dommages relatifs se concentrent sur les cellules tumorales et non sur les cellules saines. En outre, ces atomes ne conservent généralement leur activité radioactive que durant une semaine environ avant de s’éteindre tout simplement.

Contrairement à ces atomes, les médicaments qui n’atteignent pas les cellules tumorales et qui ne les enveloppent pas sont rapidement excrétés, normalement par les reins. Il s’agit d’un mécanisme de protection endogène visant à minimiser le temps de circulation des médicaments dans l’organisme.

Une fois injectée dans la circulation sanguine, une thérapie ciblée par radioligand achemine les atomes radioactifs individuels dans tout le corps jusqu’à leur destination. Au cours de leur trajet, ces atomes causent peu ou pas de dégâts étant donné qu’ils ne se regroupent qu’après avoir atteint leur cible. Arrivés à destination, plusieurs atomes radioactifs enveloppent la tumeur et utilisent leur puissance combinée pour infliger de gros dégâts à la tumeur.

« Dès qu’une cellule tumorale a subi un certain nombre de dommages, elle capitule tout simplement et meurt », explique Chris Leamon.

 

Diagnostic et localisation du cancer grâce à la médecine nucléaire
La médecine nucléaire présente aussi une composante diagnostique. Elle utilise la même molécule spécifique de la tumeur qu’en oncothérapie mais délivre des atomes radioactifs qui ont le pouvoir d’identifier et de localiser le cancer. Ces atomes émettent des rayons gamma qui sont détectés à l’aide de scanners spéciaux. Si le médicament débusque le cancer recherché, ce dernier sera révélé et ce, peu importe où il se niche dans l’organisme. Cela s’applique même à de minuscules zones impossibles à exciser par un chirurgien. Photo de Michael Hofman, avec l’aimable autorisation du Journal of Nuclear Medicine. Animation de Fidelis Onwubueke


La médecine nucléaire présente aussi une composante diagnostique. Elle utilise la même molécule spécifique de la tumeur que l’agent thérapeutique pour identifier le cancer et le localiser.

Ces atomes dégagent une forme d’énergie n’occasionnant que peu de dégâts. Elle s’apparente à une onde lumineuse qui peut être détectée ex vivo par des scanners. A présent, les médecins peuvent voir le cancer, peu importe l’endroit où il s’est propagé dans l’organisme.

Ce n’est que lorsque les pièces du puzzle moléculaire s’imbriquent que le diagnostic peut révéler le cancer d’un patient. Si tel est le cas, une thérapie ciblée par radioligand avec la même molécule spécifique de la tumeur constitue une option thérapeutique appropriée.

Cette approche diagnostique et thérapeutique permet aux médecins de choisir le médicament adapté à la forme de cancer spécifique au patient. Les futurs scanners peuvent en outre aider les médecins à déterminer l’efficacité du médicament et à faire progresser le traitement.

« Nous pouvons voir où va le médicament, combien de temps il y reste et ce qui se passe pendant ce temps-là », précise Germo Gericke. « Cela nous permet de mener des études qui nous aident à mieux comprendre cette approche. »

Pierre angulaire de l’oncothérapie

En 2018, Novartis a fait l’acquisition d’Advanced Accelerator Applications, une entreprise française ayant déjà décrypté la logistique relative à l’utilisation d’atomes radioactifs pour une thérapie ciblée par radioligand et qui a joué le rôle de pionnier dans le développement clinique. Peu après s’en est suivi l’acquisition d’une autre entreprise du nom d’Endocyte, qui suivait également des approches d’un nouveau genre pour des thérapies ciblées contre le cancer.

Les équipes travaillent maintenant avec des collègues de Novartis à l’élargissement de la panoplie de thérapies ciblées par radioligand pour traiter un large spectre de cancers. Elles réalisent également des essais cliniques pour en savoir plus sur la façon dont les patients réagissent à cette forme avancée de médecine nucléaire.

Et Germo Gericke de conclure : « Nous sommes en mesure de mobiliser notre expertise collective en matière de médecine nucléaire, tant sur le plan diagnostique que thérapeutique, au profit des patients atteints d’un cancer. »